L'écluse à portes d'èbe et de flot


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Plan figurant les trois doubles portes d'èbe et de flot installées à "l'écluse triple". Ce carrefour hydraulique se décompose de la manière suivante : En haut à gauche, l'accès au canal d'irrigation alimentant les prairies de Buzay ;en haut à droite, c'est l'accès au Tenu ; en bas à gauche, c'est le contact avec la canal de la basse Loire.

(Source AD Loire-Atlantique. Cote : 1904 S 1783)



 

Héritée de savoirs faire locaux théorisés par l'hydraulique militaire et maritime, l'écluse à portes d'èbe et de flot témoigne de la spécificité des marais de l'estuaire, soumis à l'influence des marées, marqués par l'alternance d'un régime hivernal d'évacuation des eaux en période de crues, et d'un régime estival d'irrigation. Au XVIIIe siècle, B. Forest de Bélidor la décrit ainsi : "Une écluse est un lieu choisi dans un canal ou un courant d'eau, pour y construire deux ailes de maçonnerie que l'on nomme bajoyer ou jouillères, […] l'une placée à la rive droite et l'autre à la gauche, au milieu desquelles on pratique un espace ou chambre, fermé ordinairement par deux paires de portes busquées, c'est-à-dire dont les vanteaux s'arcboutent réciproquement, […] lesquels s'ouvrent et se ferment à volonté pour faciliter l'écoulement des eaux et le passage des bateaux(1)".

Ces doubles portes en bois manœuvrent par rotation sur un axe horizontal.
En hiver, l'ouverture des portes de flot, " qui regardent le rivage " ainsi que B. Forest de Bélidor les désigne(2), c'est à dire busquées en direction de la mer, permet d'écouler les eaux pluviales qui s'accumulent à l'intérieur du marais. En revanche, afin d'empêcher l'entrée du flot lors de la marée montante, on procède à la fermeture de ces portes. Durant cette période, la manœuvre des portes de flot suffit à la gestion du marais puisque les portes d'èbe, " celles qui regardent le pays ", dirigées vers l'intérieur des terres, sont maintenues ouvertes.
L'été, afin d'irriguer et de baigner les marais on procède à l'envoi de "marées", c'est à dire que l'on ouvre les portes des écluses au moment où la marée dynamique fait refluer dans les étiers et canaux les eaux fluviales descendues plus à l'aval dans l'estuaire à marée basse ; portes d'èbe et de flot sont donc ouvertes à marée montante, laissant pénétrer la quantité d'eau voulue. Puis, avant que le mouvement de la marée ne s'inverse, on ferme les portes d'èbe afin de retenir les eaux "rentrées" au marais. À " l'intérieur ", des vannes et barrages assurent ensuite la bonne répartition de ces eaux.

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(1) Bélidor, B. Forest de, Architecture Hydraulique, seconde partie. Qui comprend l'art de diriger les eaux de la mer et des rivières et l'avantage de la défense des Places, du Commerce et de l'Agriculture. Paris. 1750, t. 1, p 54.
(2) ID., ibid.

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Schéma des éléments constitutifs
d'une écluse à portes d'èbe et de flot.

(Infographie ADIG, M. Brugier, R. Dutreuil)

L'écluse à portes d'èbe et de flot de Vair
(Saint-Étienne-de-Montluc).

(Cliché Estuarium)

Extrait d'un plan figurant les écluses à portes d'èbe et de flot de Rosé, en Brière.
(Saint-Malo-de-Guersac).

(Source AD Loire-Atlantique)