Un modèle hydraulique spécifique


Inondation hivernale des marais du Lot à Cordemais. Il est alors dit que les marais "blanchissent".
(cliché Estuarium)
 

Le principe

Les marais de l'estuaire de la Loire sont caractérisés par un engorgement hivernal dû aux crues du fleuve, aux précipitations et aux affluents qui déversent alors leurs eaux dans les marais et participent à l'inondation des zones humides. Par contre durant l'été, la tendance est à la sécheresse, dans un contexte de climat océanique qui est parfois proche du seuil d'aridité(1).
Dans un souci de mise en valeur et d'exploitation des prairies alluviales, en réponse à cette double contrainte, l'homme a très tôt su tirer parti du mouvement des marées, caractéristique essentielle de la dynamique des estuaires, et utilisée de fait comme un moteur hydraulique : ce système hydraulique réside dans l'utilisation du mouvement alternatif de l'eau dû au mouvement des marées pour exonder ou irriguer, par le biais des mêmes canaux, étiers et vannages.

Le fonctionnement

Les aménagements réalisés dans les zones humides de l'estuaire de la Loire entrent dans le cadre ce que l'on peut désigner comme un " modèle estuarien ". Sa spécificité est de disposer d'un système hydraulique réversible où l'eau coule dans les deux sens par le biais de nombreux vannages constitutifs d'un dispositif complexe et subtil, que l'on ouvre ou que l'on ferme à loisir. Les ouvrages hydrauliques les plus représentatifs de ce " modèle estuarien " sont sans nul doute les portes d'èbe et portes de flot.

L'exondation : L'hiver lorsque les marais sont inondés - on dit qu'ils "blanchissent" -, on peut à marée descendante exonder les eaux du bassin versant qui rejoignent le fleuve. Lors de la marée montante, on ferme les portes des vannages pour empêcher le retour intempestif des eaux par le reflux de la marée.

Les envois de marée : En période estivale, quand on souhaite à l'inverse "faire baigner" les prairies pour remédier aux inconvénients de la sécheresse, on ouvre les portes durant le flot afin que les eaux douces du fleuve pénètrent dans les étiers ; on les ferme ensuite pour retenir le précieux liquide dans le marais quand la marée s'inverse.

À noter que si le principe général est le même dans tous les marais étudiés, chaque marais a sa propre spécificité. Dans la réalité, de nombreuses nuances existent, notamment en ce qui concerne les dates d'ouvertures et fermetures des portes, selon les besoins spécifiques inhérents à chaque unité de marais
.

_________________________________

(1)
J.-E. Gras, L'eau dans la région nantaise. Cahiers Nantais, 23, 1984. p1.