Milieux humides, richesse écologique de l'estuaire de la Loire
Un écosystème parmi les plus fertiles de la planète
Les zones humides figurent aujourd'hui parmi les écosystèmes (ensemble
constitué d'un biotope - un milieu - et d'une biocénose - ensemble des êtres
vivants -) les plus productifs de la planète. Espace terraqué, lieu de mélange
des eaux marines et des eaux douces, c'est l'abondance des ressources qui
favorise l'explosion de la vie sous toutes ces formes. La production de sels
minéraux et de matière organique y est très importante et tous les éléments
d'une chaîne alimentaire complexe sont réunis : des centaines de plantes,
d'insectes, de rongeurs, de poissons et êtres aquatiques, d'oiseaux de toute
sorte, et des mammifères évoluent dans ce milieu extrêmement riche mais également
très fragile.
Une richesse liée à la diversité des milieux
Véritables "monument naturel", ces zones humides sont composées de plusieurs
biotopes relativement différenciés : - les rives et les îles sont des milieux
inondables, parcourus par une multitude de petits étiers. Il y règne une flore
luxuriante, halophile et hygrophile, adaptée au sel et à l'eau : phragmites,
scirpes, l'Angélique des estuaires et parfois quelques saulaies sur les portions
les plus exondées. La route des Carris qui traverse l'île de la Maréchale
plonge le promeneur dans cet univers. - les prairies mésophiles (conditions
d'humidité moyennes), situées sur des reliefs (les bourrelets de rives, le
centre de quelques îles ou les prairies de Tenu), sont des espaces ouverts,
colonisés par l'homme, striées par un important réseau de douves. - dans les
parties les plus déprimées on rencontre un dernier type de milieu hygrophile,
repérable par de nombreuses variétés de joncs. Ces marais inondés périodiquement,
sont sous l'influence directe des précipitations et des crues du Tenu-Acheneau
(partie sud des marais de Vue).
Faune et flore : une biocénose exceptionnelle
Diversité et rareté
Les marais du sud-Loire abritent plus de 700 espèces de plantes. Certaines,
d'une grande rareté, bénéficient d'une protection internationale comme l'Angélique
des estuaires. D'autres comme l'Etoile d'eau, la Gratiole officinale ou le
Trèfle de Micheli par exemple, sont protégées au niveau régional. La faune
y est tout aussi remarquable, souvent menacée mais parfois en état de conserver
sinon de reconquérir des positions. On annonce le retour d'espèces emblématiques
telles la Loutre d'Europe, visible occasionnellement dans les îles situées
à la confluence de la Loire et du Tenu, la Cigogne blanche, désormais assez
régulière dans l'estuaire, ou encore la Spatule blanche, un des oiseaux nicheurs
les plus rares de France, dont quelques couples se reproduisent dans la zone
de Grand-Lieu. Avec près de 230 espèces d'oiseaux dénombrées, les marais du
sud-Loire et la réserve du Massereau sont d'abord reconnus comme sites de
valeur internationale pour l'avifaune migratrice, hivernante ou nicheuse.
Des mesures d'identification et de protection du patrimoine naturel
Cette richesse floristique et faunistique, mesurée par le nombre et la
diversité des espèces, est établie à partir d'inventaires scientifiques réalisés
sur certaines zones délimitées du milieu naturel, les Zones Importantes pour
la Conservation des Oiseaux (Z.I.C.O.), et les Zones Naturelles d'Intérêt
écologique, Floristique et Faunistique (Z.N.I.E.F.F.). Outils de connaissance,
ces inventaires peuvent contribuer à la gestion de ces milieux particulièrement
riches, mais fragiles. Dans l'esprit de conserver ce patrimoine, la France
prend des engagements au niveau international (convention de RAMSAR pour la
protection des zones humides) et notamment européen, dans le cadre des conventions
de Bonn et de Berne de 1979, visant la sauvegarde des espèces migratrices
menacées (directive "Oiseaux") et la protection de la vie sauvage et du milieu
naturel. En ce sens, la directive "Habitats" de 1992 prévoit, d'ici 2004,
la mise en place d'un réseau d'espaces protégés à travers l'Europe (réseau
Natura 2000), intégrant certaines zones d'intérêt majeur de l'estuaire de
la Loire et de la vallée de l'Acheneau. L'état et les collectivités territoriales
s'efforcent aussi de mettre en oeuvre les dispositifs existants à l'échelon
national, en privilégiant désormais des modes de gestion du patrimoine naturel
intégrant les activités humaines qui participent au maintien de la biodiversité.
A titre d'exemple, la loi du 2 mai 1930 permet le classement des sites paysagers
remarquables. Cette procédure de classement est actuellement engagée dans
l'estuaire de la Loire sur 6.000 hectares, principalement autour des marais
de Vue et de Buzay et sur les îles.
Conserver, gérer, valoriser : différents niveaux d'intervention écologique
L'île du Massereau ou l'exemple d'une gestion conservatoire du milieu
La création d'une réserve de chasse en 1973 par l'Office National de la
Chasse, l'entretien des milieux naturels par une gestion fine de l'hydraulique
favorisent le maintien et l'accroissement d'une avifaune riche et diversifiée
dans l'île du Massereau. Depuis 1991, cette réserve est associée à un programme
de conservation de la Vache nantaise. Par la réintroduction de cette race
bovine polyvalente et bien adaptée aux terroirs de marais on entend aussi
prévenir la "fermeture" du milieu et en préserver la qualité écologique.
L'Opération Locale Agri-Environnement (O.L.A.E.) sud-Loire
Dans le cadre d'une O.L.A.E., l'Etat s'efforce de soutenir une agriculture
respectueuse de l'environnement. La rotation des cultures, la limitation de
l'emploi des fertilisants et des produits phytosanitaires, l'adaptation des
dates de fauche et d'ouverture au pâturage, doivent permettre de "préserver
et valoriser des biotopes sensibles de marais"... "pour l'accueil de nombreuses
espèces d'oiseaux migrateurs...". Sur les îles, cette gestion agri-environnementale
vise plus spécifiquement le sauvetage du Râle des genêts et la protection
d'autres espèces ornithologiques d'intérêt local ou départemental : le Tarier
des prés, le Bruant des roseaux, le Vanneau huppé...
Proposition d'une valorisation chiroptérologique (source Ouest-Aménagement)
Les opérations de réhabilitation du patrimoine hydraulique nécessaires
à l'entretien du site pourront également intégrer des considérations écologiques.
A titre d'exemple, les interstices dans les maçonneries des ponts, vannes
et écluses des marais du sud-Loire peuvent abriter des colonies de chauves-souris,
Murin de Daubenton, Grand Murin, Pispistrelles... toutes ces espèces aujourd'hui
protégées et utiles, qui se nourrissent exclusivement d'insectes, méritent
une attention particulière lors de la réfection des ouvrages.